The Hilt : fascinant trait d'union entre Bourgogne et Californie
The Hilt Estate - Chardonnay Bentrock Vineyard 2021

Autre parcellaire, autre univers : ici, tout n’est que luxe, calme et volupté, oserait-on dire… On chavire complètement face à ce vin ample, à la matière fluide et ouatée, à la sensualité profonde et caressante, qui ne manque ni d’énergie ni de sapidité pour autant. Un délice, dont vous vous souviendrez longtemps. Ici, on a un peu le sentiment que la Bourgogne et ses doux coteaux rencontre les grands terroirs de Condrieu : étonnant, non ? Et pourtant bien réel.

Les vignes de Bentrock s’enfoncent un peu plus dans les terres que celles de Radian : nichées sur des vallons aux pentes douces, elles sont entourées de forêts à perte de vue. Ces collines ondulantes se situent entre 100 et 150 mètres d’altitude. Ce sont environ 6 hectares de vignes de chardonnay d’une vingtaine d’années en moyenne qui profitent ici d’une saison de maturation longue et régulière. Argiles sédimentaires et schistes forment l’essentiel du substrat, même si l’on retrouve également des affleurements de terres de diatomées, ces sols tendres et crayeux, constitués de planctons fossilisés.

Ici, les sucres peuvent monter davantage que sur le vignoble de Radian, tandis que les acidités sont parfaitement préservées. En 2021, les rendements furent globalement affectés par la sécheresse en Californie : ce n’était pas une mauvaise nouvelle en soi. Des rendements maîtrisés sont une des conditions fixées par Matt Dees pour obtenir ces raisins mûrs et concentrés qu’il recherche. Côté élevage, il fait confiance aux fûts de chêne français : le vin y passe une petite année, avec très peu d’intervention, avant de s’affiner une année supplémentaire, d'abord en cuve puis en bouteille.

Si le terroir de Radian a donné un vin jetant des ponts évidents avec le Nord de la Bourgogne, entre Côte d’Or et Chablisien, du côté de Bentrock, au profil toujours frais mais nettement plus sensuel, c’est un étonnant mariage entre Sud Bourguignon et Nord de la Vallée du Rhône, du côté de Mauves ou Condrieu, qui semble s’offrir à nous. L’expression minérale du premier nez offre des contours plus chatoyants, plus épicés. Elle précède un fruit gourmand et bien mûr, autour de la poire, du brugnon et de la pêche jaune. Des fruits nimbés d’un doux voile floral et miellé, aux accents de fleurs de citronnier ou d’amandier, de miel de genêt et même de fleurs plus méridionales comme le bougainvillier. Une touche de pâte d’amande, une autre de nougat de Montélimar viennent maintenant caresser nos sens totalement sous le charme. La dimension florale ne cesse de se déployer au fil de l’aération : on pense maintenant à une brassée de roses blanches, au lys et au muguet. Une subtile touche d’abricot s’entremêle à une note plus tonique de zeste d’orange. C’est un pur régal.

La bouche s’ouvre là où le nez nous avait laissés, sur une déclinaison d’agrumes, frais et énergisants. Au-delà de l’orange, on trouve le citron vert, la carambole complétés d’une touche acidulée de rhubarbe qui électrise d’emblée les papilles. Encore une fois, bien loin de l’idée que l’on pourrait se faire d’un blanc californien, ce Bentrock est ciselé au laser : la matière, dynamique, ne cesse d’aller de l’avant, de « swinguer ». L’énergie des agrumes est bientôt rejointe par un souffle chlorophyllien, évoquant le fenouil sauvage et la coriandre fraîche. On finit sur une subtile note empyreumatique et cendrée.

Taillé pour une garde de 5 à 10 ans, ce Chardonnay Bentrock vous régalera aussi dans sa jeunesse, après un bon carafage, sur une lotte bardée puis rôtie au safran, un risotto aux fruits de mer ou encore des ris de veau rôtis, servis avec un jus réduit au caramel d’agrumes.

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