C'est l'un des plus petits vignobles français. Avec ses 1 900 hectares (0,3 % des vignes nationales) exploités par 44 caves coopératives et environ 250 viticulteurs indépendants et ses 78 000 hectolitres produits annuellement, le Jura est bien loin des dimensions de son homologue du Val de Loire (70 000 hectares) ou des volumes réalisés en Bourgogne (1,5 million d'hectolitres annuels). Pour autant, ses vins ont su se faire une place au sein de la vaste gamme des productions françaises, en se concentrant tout particulièrement sur la qualité et la diversité de ses crus et sur leur originalité. Une reconnaissance qui repose avant tout sur sa gamme de blancs, représentant deux tiers du vignoble jurassien, élaborés à base de savagnin, cépage régional par excellence, et de chardonnay. Le Jura perpétue également des traditions originales de vinification, comme pour élaborer le fameux vin jaune dont la « personnalité » atypique est intimement liée au terroir jurassien.
Les origines du vignoble jurassien sont entourées d'un halo de mystère. Les sources historiques font défaut pour établir sa chronologie exacte. Quelques indices présents dans des textes anciens permettent toutefois d'attester de la présence des vignes sur ce territoire depuis presque deux millénaires.
En l'an 80 après J.-C., le consul romain Pline le Jeune évoque déjà les vins du Jura, issus de « ce raisin qui, sans apprêt, fournit un vin à saveur de poix, raisin célèbre du Viennois [Autriche], dont s'est enrichie la Séquanie ». La Séquanie désigne alors un territoire s'étendant, dans la Gaule romaine, de la Saône au Jura.
Au Xe siècle, ces mêmes vins sont également cités dans des documents historiques de la ville jurassienne d'Arbois, dont les productions seront plus tard introduites à la cour du roi de France par Philippe le Bel au XIIIe siècle. François Ier ou Henri IV maintiennent cette tradition.
L'activité du vignoble jurassien va cependant connaître un violent coup d'arrêt au cœur du XVIIe siècle, à l'occasion de la guerre de Dix Ans (1634-1644). Le comté de Bourgogne, territoire dont les frontières recoupent peu ou prou celles de la Franche-Comté actuelle, est envahi par les troupes françaises. Possession des Habsbourg d'Espagne, la région est dévastée par une décennie de campagnes militaires. Les vignobles sont bien évidemment touchés par ces destructions. En quelques décennies, l'activité viticole et vinicole parvient toutefois à retrouver sa vitalité et va même être en capacité d'afficher assez rapidement une certaine prospérité.
Le XVIIIe siècle marque un tournant pour les vins du Jura. La question de la qualité du vignoble et des productions qui en découlent est posée. Dès 1732, un décret limite la liste des cépages autorisés. L'évolution ainsi engagée est confirmée quelques décennies plus tard avec l'établissement, en 1774, d'une liste de 14 bons plants pour l’élaboration des vins de Jura.
La marche en avant du vignoble jurassien se poursuit au fil du XIXe siècle, mais elle va être stoppée à partir de 1879. Le secteur connaît alors une crise d'ampleur. Le phylloxéra atteint le Jura et touche progressivement l'ensemble des exploitations viticoles. Les 20 000 hectares de vignes du Jura sont détruits en une quinzaine d'années par ce puceron dévastateur venu des États-Unis. Au tournant du siècle, c'est un Jurassien, Alexis Millardet, qui va mettre au point l'hybridation des cépages, accompagnant ainsi le nouveau départ de la viticulture française grâce à l'obtention de plants résistants au phylloxéra à la suite de l’introduction de porte-greffes américains.
Dans la première moitié du XXe siècle, les garanties concernant la provenance des productions vinicoles progressent – jusqu'alors, la fraude était massive. Dans le Jura, les vignerons d'Arbois obtiennent en 1906 un certificat d'origine pour leurs vins. La marque « vin d'Arbois » est désormais protégée. C'est la même année qu'Arbois se singularise une seconde fois : la première coopérative de vinification de France y est créée, sur le modèle des fruitières fromagères. En 1936, la recherche d'une reconnaissance de la qualité des productions est toujours aussi présente dans l'esprit des tenants de la viti-viniculture d'Arbois. Ils sont ainsi parmi les premiers en France à obtenir une appellation d'origine contrôlée (AOC). Suivent Château-Chalon, L'Étoile et Côtes-du-Jura.
Le Jura dispose de productions reconnues pour leur qualité. Mais la quantité fait défaut. En 1970, la vigne n'occupe ainsi que 8 % de la surface agricole utile. Les marges de développement apparaissent pourtant considérables. Face à cette problématique, une vaste opération de relance du vignoble est engagée. Remembrement, replantations en cépages AOC, contrôles renforcés sur la qualité : des initiatives sont lancées tous azimuts. Patron et homme d'affaires, Henri Maire symbolise, à travers les actions qu'il mène pour son domaine, cette volonté de donner un second souffle au vignoble jurassien. Il développera son exploitation pour en faire l'une des plus vastes de France en appellation contrôlée (300 hectares d'AOC Arbois) et multipliera les innovations commerciales (vente par correspondance, panneaux publicitaires dans toute la France…) pour élargir sa clientèle et assurer son expansion économique.
Malgré tout, le vignoble va garder une taille modeste jusqu'à nos jours, légèrement sous la barre des 2 000 hectares, ses défenseurs misant avant tout sur la qualité pour promouvoir les différents crus. Deux nouvelles appellations d'origine contrôlée sont venues conforter cette stratégie dans les années 1990 : l'AOC Macvin en 1991 et l'AOC Crémant du Jura en 1995, appellation qui a connu une belle expansion. 90 % de la surface viticole jurassienne sont aujourd'hui plantés en AOC.
Le vignoble jurassien s'étire sur une centaine de kilomètres, de Salins-les-Bains au nord-est à Saint-Amour au sud-ouest, sur une bande de terre de quelques kilomètres de large. Les 1 900 hectares de cette zone baptisée le Bon Pays ou Revermont s'étendent sur le département du Jura et sont caractérisés par une forte diversité – on dénombre sur ce périmètre somme toute assez réduit 5 cépages et 6 appellations. Autre caractéristique importante de ce vignoble : son implantation en bordure d'une zone montagnarde, le Jura, sur des coteaux assez accidentés entre 200 et 500 mètres d’altitude. Les fortes pentes, jusqu’à 40 %, obligent parfois les vignerons à cultiver la vigne en terrasses. Ces vignobles, exposés le plus souvent au sud et au sud-ouest, font face aux vignes bourguignonnes du Mâconnais et de la Côte-d'Or qui ont pris place de l'autre côté de la plaine de la Bresse.
Le sous-sol du premier plateau jurassien (ou lédonien) est principalement constitué d'argile et de calcaires sur le haut des pentes. Les sols des coteaux où les vignes prennent place présentent, pour leur part, une composition relativement complexe. Caillouteux et peu épais, ils regroupent plusieurs types de marnes (bleues, rouges, noires, grises), des argiles mais aussi des éboulis calcaires issus de la détérioration des calcaires durs des hauts de coteau. La présence des éboulis favorise le drainage et le réchauffement des sols, donc la culture de la vigne.
De la diversité des terroirs du Revermont découle la grande diversité des cépages cultivés dans ce petit territoire. Leur choix est déterminé en fonction des sols, de l'altitude et de l’exposition.
Le climat joue lui aussi un rôle clé dans la physionomie du vignoble jurassien. Nous nous trouvons ici sur des terres septentrionales où le climat est de type semi-continental, marqué par des hivers rudes, très froids, et des étés chauds et secs. Les variations de température peuvent être brutales. Le printemps est généralement froid et humide, l'automne fréquemment pluvieux. Les précipitations sont globalement bien réparties sur l'ensemble de l'année et atteignent une moyenne de 1 150 mm par an. La température moyenne est située entre 11° et 13 °C.
Le Revermont possède enfin en son sein de nombreux microclimats, du fait des variations de relief, de la pente ou d'exposition au soleil. Globalement, les vignerons ont adopté ici des cépages tardifs comme le savagnin, qui n’ont pas encore bourgeonné au moment des fréquentes gelées printanières, et privilégié des expositions sud et sud-ouest garantissant chaleur et ensoleillement suffisants pour que le raisin atteigne une bonne maturité. Il n’est pas rare, dans le Jura, de vendanger jusqu’en novembre !
Sur les cinq cépages que compte le Jura, deux sont dédiés aux vins blancs : le savagnin et le chardonnay. On les retrouve sur l'ensemble des 6 AOC dont dispose le vignoble de cette région (Arbois, Château-Chalon, L'Étoile, Côtes-du-Jura, Macvin et Crémant du Jura). Ces vins blancs dominent aujourd'hui l'espace jurassien. Contribuant à sa renommée, ils jouent un grand rôle dans la reconnaissance du Jura comme région de production vinicole, notamment grâce à des produits atypiques comme le vin de paille, le vin jaune ou le macvin.
Des deux cépages blancs, le savagnin apparaît comme « l'enfant du pays ». Ce cépage jurassien a grandement contribué à la typicité aromatique tant recherchée dans les vins du Jura. C'est lui qui se cache derrière l'élaboration du fameux vin jaune. Il représente aujourd'hui quelque 300 hectares soit 15 % du vignoble du Jura, sur les terroirs de marnes grises. Son raisin mûrit plus lentement que celui des autres cépages. Il est donc fréquemment vendangé en fin de récolte, environ deux semaines après les autres parcelles.
Le chardonnay, pour sa part, est originaire du vignoble voisin de Bourgogne. S'il n'est pas à proprement parler du cru, ce cépage n'en possède pas moins une longue histoire dans le Jura : il est présent dans la région depuis le Xe siècle, sous les noms de melon d'Arbois, de moular à Poligny ou de gamay blanc. Il est aussi le cépage le plus important du vignoble jurassien, représentant environ la moitié des surfaces plantées. Son succès s'explique par sa bonne capacité d'adaptation aux hivers jurassiens souvent vigoureux et aux sols argilo-calcaires qui lui permettent d’exprimer dans le vin fraîcheur et minéralité.
C'est une caractéristique propre à la viniculture jurassienne : certains vins blancs sont produits « non ouillés ». Ainsi, le remplissage périodique du fût, qui permet traditionnellement à ce dernier de garder son niveau maximal et d’éviter ainsi la trop grande présence d’oxygène pendant l’élevage, n'a pas lieu. Essentiellement pratiquée avec le savagnin, le « non-ouillage » entraîne l'évaporation d'une partie du vin (dite « la part des anges »), qui peut atteindre jusqu'à 40 % du volume. Un voile de levures se développe alors en surface, protégeant le vin « sous voile » d’une trop grande oxydation durant son vieillissement.
Le plus célèbre des vins « non ouillés » est le vin jaune. Après la phase de fermentation, il restera un minimum de 6 ans et 3 mois en fûts de chêne, sous le fameux voile. Ces levures ont un autre rôle clé dans le processus de vinification : elles participent à la constitution du goût atypique du produit final, et tout particulièrement ses notes oxydatives évoquant noix et amande grillée. Le vin jaune, à la couleur or qui lui donne son nom, a permis de faire connaître la viticulture jurassienne à un large public. Initialement rattaché à l'appellation Château-Chalon, ce vin sec est aujourd'hui également produit en AOC Arbois, L'Étoile ainsi qu'en Côtes-du-Jura. Tout a été pensé pour en faire un produit unique, de la fête organisée à l'issue de son long repos – la Percée du vin jaune, chaque premier week-end de février – jusqu'à son écrin, une bouteille spécifique appelée « clavelin » et ne contenant que 62 centilitres.
Autre production qui se distingue dans le Jura : le vin de paille. Il est réalisé à partir de belles grappes qui sont mises à sécher au cours de l'opération du « passerillage ». Les grains (savagnin et chardonnay pour les blancs) sont placés dans des greniers aérés, sur des lits de paille, des claies ou suspendus à des fils durant au moins 6 semaines. Un processus de déshydratation progressive s'enclenche en même temps que les grains voient leur concentration de sucre augmenter. Les grappes sont ensuite pressées puis mises à fermenter. Ce vin liquoreux naturellement sucré est enfin élevé 3 ans en tonneaux pour lui permettre de forger ses arômes. Le mode de confection atypique de ce vin a pour conséquence logique un rendement particulièrement faible : 100 kilos de raisin sont nécessaires pour obtenir une vingtaine de litres de vin de paille. Il est produit dans les appellations Côtes-de-Jura, Arbois et L’Étoile.
C’est un vin qui surprend par sa couleur ambrée et sa puissance aromatique, mêlant notes de fruits confits (orange, prune, coing), de caramel, d’épices (cannelle, vanille), et son extraordinaire persistance en bouche.
Obtenue en 1991, l'AOC Macvin présente également une technique de vinification originale. Il s'agit en effet d'une mistelle (vin de liqueur), souvent blanc, réalisé à partir d'un tiers d'eau-de-vie de raisin et de deux tiers de moût (jus de raisin non fermenté). Toute l'originalité de l'AOC Macvin tient au fait que c'est une eau-de-vie de raisin qui est utilisée, et non une eau-de-vie de vin comme c'est souvent le cas pour ce type de production. Une eau-de-vie qui a été obtenue par distillation du marc du Jura et « rassise » (vieillie) durant un minimum de 18 mois en fûts de chêne.
Les vins blancs du vignoble jurassien se répartissent en deux grandes familles ayant chacune des caractéristiques affirmées : les vins floraux et les vins dits « tradition ».
Les vins blancs floraux sont principalement élaborés avec le cépage chardonnay – plus rarement avec du savagnin. Ledit chardonnay confère aux vins une robe de couleur jaune claire, brillante et limpide. On lui prête également quelques éclats argentés. Le nez est d'une grande finesse et marie senteurs d'aubépine, de tilleul, d'acacia, de camomille, avec des notes de fruits jaunes voire de fruits exotiques. L'attaque est puissante et vive en bouche. Les notes de pierre à fusil expriment avec finesse le terroir marno-calcaire.
De leur côté, les blancs « tradition » sont caractérisés par leur puissance. Ils sont produits avec un cépage typiquement jurassien, le savagnin, parfois assemblé avec du chardonnay. La robe jaune or ou ambrée qu'ils arborent laisse deviner des vins d'une grande intensité. Ce sont des vins très aromatiques, où les notes oxydatives de noix si caractéristiques s'imposent nettement (tout particulièrement pour le vin jaune) du fait de leur vinification spécifique, sans ouillage. Pomme verte et fruits secs sont également présents. Les blancs tradition disposent enfin d'une longueur en bouche remarquable et de beaux potentiels de garde.
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