Le Savagnin est originaire du Tyrol, en Autriche, il fait partie de la famille du Traminer et le Gewurztraminer Alsacien est son cousin. Au 16e siècle, le Jura est une province appartenant aux Habsbourg et logiquement, la circulation à l’intérieur du royaume, fait arriver le savagnin sur les pentes du Jura.
Le savagnin occupe dans le Jura environ 15% des surfaces plantées, soit 300 hectares. La plante aux feuilles vert foncé, produit de petites grappes et des baies très rondes, protégées d’une peau épaisse, très résistantes aux attaques de pourriture grise.
Cépage tardif (aussi bien pour le débourrement que pour la maturation), il est adapté au climat parfois rigoureux du Jura. Il faut compter une bonne quinzaine de jours après la vendange des autres cépages pour que le savagnin atteigne sa maturité.
On peut l’associer à d’autres cépages, notamment le chardonnay pour produire des vins d’appellation Côtes du Jura, en introduire un pourcentage dans l’élaboration des crémants du Jura ou dans la production de Macvin ou encore, l’utiliser en monocépage pour produire les célèbres Vin Jaune et Vin de Paille.
Le Vin Jaune est élevé en fût de 228 litres pendant une période de 6 ans et 3 mois. La caractéristique de l’élevage est que les tonneaux ne sont pas ouillés, c’est à dire que la part de liquide perdue par évaporation durant ces six longues années, n’est pas remplacée, d’où une perte substantielle appelée la “Part des Anges” et l’utilisation d’une bouteille particulière, le clavelin, qui ne contient que 62 centilitres de vin pour tenir compte de ce vin perdu.
L’élevage en vin de paille consiste à laisser les raisins sur pied ou sur paille, perdre progressivement leur eau, leur permettant d’atteindre un taux de sucre très élevé, pour en faire des vins de dessert bien sûr.
Sauf pour les Andalous, dont le Xerez élevé en “solera”, leur a appris les arômes et le goût de l’oxydation du vin, l’expérience du Vin Jaune de savagnin est unique pour l’amateur de vin. Ce vin ne ressemble qu’à lui-même, évoquant la noix, la noisette, les amandes, la pomme, et en bouche, de nombreuses épices. Du fait de son élevage si long, le Vin Jaune a une propension à vieillir quasi indéfiniment, on peut annoncer 100 ans sans passer pour un hâbleur. La longueur en bouche, lorsque le millésime est beau, se mesure en minutes…
Le savagnin est le fils du pays, à la fois à travers sa présence dans nombre d’appellations d’origine locales, mais également à travers de fameux accords mets-vin où il n’a pas de concurrent. AOC Côtes-du- Jura en assemblage, AOC Côtes-du-Jura Vin Jaune en monocépage, AOC Arbois en assemblage, AOC Arbois Vin Jaune en monocépage, c’est encore la même chose pour l’appellation Etoile et Vin Jaune de l’Etoile. Enfin pour l’appellation Château-Chalon, considérée comme le grand cru local, le savagnin la compose à 100%.
Un fromage local, le Comté, constitue l’accord référentiel avec le Vin Jaune. Au-delà du cliché, si vous faites l’expérience, et que vous vous demandez en quoi consiste un accord parfait, vous aurez la réponse. En effet, les caractéristiques olfactives du vin sont préservées à 100%, de même que celles du fromage. En bouche, l’intégralité des saveurs des deux aliments le sont tout autant et, au-delà, l’entente parfaite entre ces deux entités crée une sensation de plénitude qu’aucun des deux participants n’est capable d’atteindre seul. Les accords avec les amandes, comme la fameuse truite aux amandes, ceux avec les morilles et bien sûr avec les volailles, comme le classique coq au Vin Jaune, contribuent à assurer la réputation des vins issus du savagnin.