La nouvelle est tombée en cette chaude fin d’été, juste avant le début des vendanges : les frères Benoît et Jean-Baptiste Bachelet (du Domaine familial Jean-Claude Bachelet) ont décroché leur deuxième étoile dans le fameux Guide Vert des meilleurs vins de France ! Nos deux trentenaires du hameau de Gamay, à Saint-Aubin, rejoignent ainsi un cénacle aussi fermé que prestigieux où se côtoient quelques-uns des plus grands noms de la Côte de Beaune, Jacques ou François Carillon, Etienne Sauzet, Pierre Morey, Michel Bouzereau, Marc Colin… pour ne citer qu’eux ! Nous avons juste envie de dire Bravo, cent fois Bravo ! Car, sérieusement, à finage comparable, qui fait mieux et meilleur que les Bachelet aujourd’hui ?...
Leurs vins ont tout ce dont on peut rêver lorsque l’on aime les blancs de Bourgogne, l’élégance, la complexité, la densité de saveur, la précision, l’expression des sols. Année après année, sous la pluie (2013), sans la pluie (2010), sur des millésimes très solaires (2009 et 2015) ou très frais (2008), qu’il y ait « trop » de vin (2011) ou bien pas assez (2016), tous les millésimes sont réussis, et ça, ce n’est pas une mince affaire !
Olivier Poussier lui-même ne s’y était pas trompé lorsqu’il avait « sorti » pour ainsi dire tous les blancs du tandem dans la Revue du Vin de France consacrée aux meilleurs vins du millésime 2011. Auparavant, lorsque nous avions eu la possibilité de découvrir le millésime 2008 à la propriété, puis de le goûter à nouveau aux Grands Jours de Bourgogne 2010, au milieu de tant d’éminents vignerons, force fut de constater que leurs vins y brillaient de mille feux : il y avait tout, un fruit scintillant, une matière vivante, nourrissante, active (ils n’étaient pourtant pas encore passés à la bio-dynamie à l’époque), une définition de la minéralité des sols spectaculaire, et des longueurs, des longueurs qui laissaient le gros de l’aréopage Bourguignon présent proprement cloué sur place.
Dans le cadre du millésime précédent, le 2007, réputé relativement pauvre en fruit, un millésime du genre « peau sur les os », (que, soit dit en passant, nous pensons avoir compris à l’époque et adorons déguster aujourd’hui), ils avaient réussi à trouver un point de vendange idéal : aucune maigreur, aucune austérité n’était perceptible dans leurs vins qui avaient parfaitement su conserver les vrais atouts du millésime : une définition, une tension et une précision en tous points remarquables.
D’ailleurs, lors d'un dîner assis concocté pour une trentaine de personnes par un grand chef doublement étoilé, en septembre 2011, nous avions proposé de faire servir leur Chassagne-Montrachet les Enceignères 2007 avec les mises en bouche : un vin qui a immédiatement suscité l’adhésion générale, même si aucun des convives ne connaissait encore le Domaine, une unanimité qui en dit long sur le talent de ces vignerons…
Au final, cette réussite sans nuage ou presque n’étonnera pas tous ceux qui connaissent la force de travail de Benoît et Jean-Baptiste, leur abnégation, la compréhension profonde de ce qu’ils doivent faire (merci au « paternel », Jean-Claude !), la perfection quasi-maniaque des gestes à la vigne comme à la cave, et les interventions millimétrées à chaque étape du développement du cycle végétatif. Ajoutons, et il n’est pas du tout question ici d’un romantisme de pacotille, que les deux frères témoignent en permanence d'un respect profond de ce qui a été fait avant eux, évidemment aussi pour eux : ils le savent bien et ils en sont reconnaissants, c’est sans doute aussi pour cela qu’ils fournissent une telle somme de travail.
Pour affiner encore et encore les vins, ils n’ont pas hésité à convertir l’ensemble du domaine à la culture biologique, et désormais à la bio-dynamie, après avoir pris le temps de tester, goûter, retester, regoûter, parcelle par parcelle… afin de percevoir chaque micro-nuance qu’apporte chaque évolution des techniques culturales… De même, l ’élevage a été sans cesse allongé pour approcher aujourd'hui les deux années, et qui dit deux années dit deux millésimes à gérer en même temps. Il aura donc fallu faire sortir de terre une cuverie toute neuve au Hameau de Gamay, car c'eût été tout à fait impossible de satisfaire leur ambition à l’ancien domaine familial de la rue de la Fontaine à moins de continuer à vendre, encore et toujours, le plus gros de la récolte au négoce Beaunois.
Quand on s’endette et continue à investir autant alors qu’on est déjà largement reconnu, on peut raisonnablement parler de quête du Graal : les Bachelet sont un peu comme ces chevaliers de la légende du précieux calice, ils ont en eux la noblesse, la ténacité et le courage.
Au fil de nos très nombreux voyages sur les routes des vignobles de France, nous avons pu constater lorsque le nom des Bachelet venait à être évoqué, pour une raison ou pour une autre, que leur réputation auprès de leurs pairs et autres collègues vignerons dépassait déjà largement les « frontières » de la Bourgogne. Humainement, professionnellement, moralement, ils sont admirables… et ça commence à se savoir! Leur talent éclabousse la Côte d’Or toute entière, et nous en sommes sincèrement heureux pour eux ! Pour finir, osons ce jeu de mot un peu facile mais trop tentant : Benoît et Jean-Baptiste, désormais adeptes de la bio-dynamie, façonnent des vins si explosifs que l’on devrait plutôt parler de « bio-dynamite ! »
Nous vous donnons rendez-vous avec les vins du Domaine à la fin de l’année pour découvrir le millésime 2016…