En cette période de préparation des fêtes, nous vous invitons à faire un détour par le Sauternais pour y découvrir une petite pépite issue du village de Preignac, fief de la famille Médeville depuis le début du 18ème siècle. Ce village idéalement situé à la confluence du Ciron, cette rivière aux eaux froides venue des Landes, et de la Garonne, offre toutes les conditions pour élaborer de grands vins liquoreux de Sauternes : d'excellents terroirs graveleux et argilo-calcaires, les brumes matinales omniprésentes entre la fin de l’été et le début de l’automne, qui favorisent l’arrivée de l’indispensable botrytis, et les belles arrière-saisons aux après-midi ensoleillés…
Toute la planète vin connaît bien sûr le légendaire (et minuscule) Château Gilette et ses fameuses Crèmes de tête, vieillies souvent plus de 20 ans avant leur commercialisation. Ce que l’on sait peut-être moins c’est que la famille Médeville, heureuse propriétaire de ce mythe sauternais, est aussi à la tête d’un autre joyau, voisin du premier : le Château Les Justices. On retrouve ici un pont stylistique évident avec le premier, même si les vins sont, bien sûr, plus abordables.
Le vignoble doit son nom à une belle parcelle de près de 6 hectares, portant le nom du lieu-dit des Justices, à l’entrée du village de Preignac. Dans les années 1950, René Médeville, le grand-père de Julie qui tient aujourd'hui les rênes du Domaine, complète ce patrimoine par une vigne regardant en direction du village de Sauternes. Deux vignes et deux terroirs bien différents et très complémentaires. Géologiquement, le premier rappelle le plateau de Barsac, avec ses sols d’argiles rouges, riches en oxydes de fer, reposant sur une assise très calcaire. Le deuxième offre à la vigne des sols dominés par les graves. Cette dualité, très qualitative, participe largement de l’identité des vins du Château des Justices. Sur les 8 hectares que compte aujourd’hui le domaine, près de 90% sont bien sûr dévolus au sémillon, le cépage-phare de l’appellation, complété d’une faible proportion de sauvignon et de muscadelle.
Aux Justices (tout comme bien sûr chez Gilette), Julie Médeville perpétue également, avec l’aide de son mari Xavier Gonet (lorsqu’il n’est pas sur ses terres champenoises pour confectionner quelques superbes bulles dont nous vous reparlerons très bientôt), une tradition tout à fait spécifique à la famille. Née, comme souvent, par le fruit du hasard et de la nécessité. Nous sommes en 1940 quand René Médeville, le grand-père de Julie, est mobilisé : il laisse alors, à contre-cœur, ses liquoreux « patienter » dans des cuves béton jusqu’à son retour… plusieurs années après! Le résultat de ce long élevage inopiné, en cuves, l’enthousiasme : de là est née cette tradition "maison" d’une vinification et d’un élevage non en fûts, mais en grands contenants inertes, ces désormais fameuses cuves en béton.
Au final, les Sauternes des Justices, élevés 18 à 24 mois en cuves, procurent une sensation de fraîcheur et d’énergie, aux accents d’agrumes, qui s’équilibrent à merveille avec des bouches charnues, généreusement fruitées et toujours digestes, portées par une belle tonicité en finale et une liqueur modérée. Des vins chatoyants et jouissifs, des vins qui respirent la générosité et l’harmonie.
Nous vous proposons aujourd’hui de remonter le temps, jusqu'en 2005. On commencera avec 2018, un millésime solaire avec peu de botrytis qui a donné un vin de plénitude, gorgé de fruits à noyau bien mûrs, d’agrumes confits et d’une trame minérale aux accents fumés et épicés qui contribue à donner au vin son rebond. On enchaînera avec l’excellent 2017, incroyable de fraîcheur, un vin juteux, tonique, que nous n’avons pas résisté à vous proposer à nouveau, après une dégustation récente chez les Médeville. On ne s'arrêtera pas en si bon chemin, pour poursuivre avec un redoutable 2016. Une année où le botrytis a tardé à se développer, et qui a accouché d'un nectar gorgé de fruits frais, d'agrumes toniques, où la fraîcheur mentholée du nez précède une empreinte minérale empyreumatique en bouche. Un délice.
Enfin, Julie nous a ouvert sa vinothèque et nous propose quelques rares flacons du millésime 2005, qui nous montre, s’il en était besoin, combien les Sauternes des Justices se magnifient avec le temps, un peu à la façon de leur « grand frère » du Château Gilette. Ce 2005 aux accents balsamiques et schisteux, qui lorgne presque du côté de quelques majestueux Rieslings en sélection de grains nobles, est magnifique d’équilibre et de vitalité. Une rareté à ne pas manquer.
Avec Les Justices, nous tenons certainement un des meilleurs rapports prix-plaisir du Sauternais. C’est excellent, c'est de saison et c’est sur la Route des Blancs.
Julie nous fait le plaisir de nous ouvrir la vinothèque familiale : une occasion unique de redécouvrir ce superbe Sauternes Les Justices 2005, à l'éclat et l'énergie parfaitement préservés. Entre notes camphrées et schisteuses rappelant de grands Rieslings botrytisés, fruits à noyau et agrumes confits, parfums de sous-bois, noix et épices, il régale.
Il s’ouvre sur une expression balsamique complexe et un jaillissement de fruits frais et d’agrumes confits. Camphre, bergamote, aiguille de pin, menthe, encens, abricot, mangue, melon, ananas, mirabelle, pierre à fusil et silex, mandarine, poivre vert, noyau de pêche… C’est un festival enthousiasmant. Savoureux, long, digeste, ce 2018 ira loin.
Il s’ouvre sur une expression minérale poudrée et épicée, entre poivre vert, curcuma et safran. Sa dimension balsamique concentrée évoquant pomme de pin et huile de bergamote précède une expression voluptueuse du fruit, entre coulis d’abricot, gelée de coing et citron confit. La finale fraîche, juteuse et vibrante nous emmène loin.
Une expression particulièrement avenante et enjouée des terroirs de Preignac, pleine de fruits frais et d’agrumes toniques, relevés d’une touche épicée stimulante, pour ce millésime 2016 où le botrytis a tardé à faire son apparition. A la fraîcheur mentholée du nez succède une empreinte minérale empyreumatique en bouche. Un délice.